Osons repenser l’action économique des collectivités locales!

L’avenir de la Guadeloupe passe par le développement des secteurs innovants, nouvelles technologies, énergies renouvelables, etc. Pour aider les porteurs de ces projets, il faut reformer notre système d’attribution d’aides, mais aussi la fiscalité. Ces changements doivent commencer dans nos collectivités.

Notre modèle désuet ne répond plus aux exigences du nouvel ordre économique. Ne disposant que de faibles ressources industrielles, le développement des secteurs innovants, (Tic, énergies renouvelables, agro-transformation), peut constituer un fort levier de développement économique pour notre territoire.
Aujourd’hui, dans ces secteurs qui convoquent la créativité, l’innovation et l’originalité, tous les cerveaux de la planète sont à égalité. Désormais, il importe de ne nourrir aucun complexe, bien au contraire. Nos régions disposent d’atouts considérables et, en premier lieu, d’une jeunesse ambitieuse, talentueuse, qui agit et pense avec le monde. Passionnés de technologies de l’information et de la communication (Tic), ils regardent le monde comme un village planétaire et repoussent les limites du possible. Face à cette nouvelle donne, les réponses apportées par nos collectivités publiques semblent bien archaïques.
Il faut remodeler et redéfinir un cadre devenu trop rigide et inopérant.

Un constat qui s’impose à nous

Les modalités de financement du Docup (hier), du POI 2014-2020 (demain) ne sont pas conçues pour ces nouveaux entrepreneurs. Elles exigent un apport en fonds propres et un préfinancement des investissements qui en découragent plus d’un. Il faut souligner les délais, anormalement longs, entre la présentation, l’instruction des dossiers et la mise à disposition effective des fonds.
Les investissements portés par les collectivités publiques (zones d’aménagement économique, zones d’aménagement concerté) privilégient le modèle économique existant et des activités économiques anciennes, mais dominantes. L’accès à ces programmes nécessitent des moyens financiers considérables et ne sont absolument pas conçus pour accueillir des patrons de start-up.
La trop grande complexité des règles d’éligibilité dans l’attribution des aides publiques brime toute initiative, même chez les porteurs de projets les plus volontaires

Explorer de nouvelles pistes

(Re)Penser le bon usage des aides directes, indirectes, et surtout l’accès aux fonds européens est capital pour proposer un nouvel environnement économique, voire un nouveau pacte social. Même si le contexte économique contraint les nouveaux entrepreneurs à ne pas être exclusivement tributaires des subventions publiques.

Lancer les opérations de microcrédits à taux zéro (Caisse des dépôts et consignations) souvent primordiales voire indispensables au démarrage des jeunes entreprises nécessitant du matériel informatique innovant.

Communiquer avec les porteurs de projets sur les nouveaux modes de financements participatifs Fundraising (collecte de fonds privés) et crowdfunding (financement participatif via internet).

Développer de vraies politiques fiscales agressives au profit des entreprises privées pour que l’argent soit réinjecté au profit des PME.

Développer de vraies politiques financières attractives au profit des multinationales pour qu’elles justifient leurs capitaux étrangers en Europe via la Guadeloupe.

Favoriser les billets de trésorerie comme mode de financement pour les collectivités afin de permettre aux entreprises privées et aux particuliers de défiscaliser les « obligations » qu’elles auront acquises en Guadeloupe.

La possibilité pour les collectivités locales à mettre en place des cautionnements ou des garanties (à l’instar de ce qui se fait pour les bailleurs sociaux) pour permettre à des porteurs de projets d’accéder plus facilement aux crédits.

La Banque publique d’investissement (BPI), récemment installée dans notre région, aura, il faut le souhaiter, rapidement à faire la preuve de son « efficacité » , tant en termes de moyens financiers mais, également, en matière d’ingénierie, de réduction de délai et de rapidité dans la prise de décisions dans l’accompagnement du financement de l’innovation et des nouvelles technologies.

Les institutions et autres collectivités devront désormais faire l’effort de s’adapter. Car, c’est bien de cela dont il s’agit ; nous devrons être capables de relever ce nouveau défi et non d’exiger des porteurs de projet qu’ils s’adaptent à un modèle désuet.

Nous avons le devoir de proposer de nouveaux outils d’accompagnement, des incubateurs et des pépinières d’entreprises qui doivent aider les jeunes pousses à grandir. Nous devons également nous donner les moyens de nous inscrire au centre de réseaux d’innovation, y compris transnationaux.

Commençons donc par opérer notre propre révolution copernicienne et « changer de logiciel » . Il faut rompre avec un certain conformisme, une facilité qui consiste à appliquer des process et des méthodes qui ont pourtant échoué. L’ère de l’emploi public s’achève. Il faut maintenant chercher d’autres voies de création d’emplois. Oui, nous avons la culture de la fonction publique et donc la peur du risque. Or, aujourd’hui, il faut donner les moyens de ce risque au jeune entrepreneur qui veut se lancer dans les secteurs innovants. Tenons compte des réalités de ce secteur et accompagnons le avec des actions adaptées. Mettons en place des critères spécifiques pour évaluer ce risque et créons de la souplesse dans notre système de financement.

Si nous n’offrons pas rapidement des opportunités concrètes à nos entrepreneurs, nous ne ferons qu’amplifier leur fuite vers d’autres horizons. La compétitivité et l’innovation nous permettra de créer de la croissance et des emplois dans nos territoires. Nous devons intégrer des modes de pensée différents et se fixer des ambitions sans limite.

Commençons par appliquer l’innovation à nos propres méthodes : faisons évoluer nos procédés afin d’en faire des facteurs de réussite. Mettons en place un écosystème fluide, collaboratif, pour relier concepts, talents et capitaux. C’est la clé de notre développement.

Certes, tout changement est difficile, mais assurément cette ambition doit nous garantir le succès. Nous allons certainement commettre des erreurs, vivre des déceptions, mais nous saurons persister et tirer les leçons de nos échecs pour toujours viser le chemin de l’excellence. C’est un chemin difficile, mais il n’y en a pas d’autres.

France Antilles – vendredi 20 juin 2014

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