Instaurer un dialogue exigeant avec l’Etat

Dans le prolongement de l’appel de Fort-de-France et à la suite de la conférence des Régions Ultrapériphériques (RUP), le président de la République recevra les présidents des RUP françaises le 7 septembre 2022.

Les présidents des régions de Guadeloupe, Réunion, Mayotte, Martinique, Saint-Martin et Guyane ont lancé depuis Fort-de-France (Martinique) un appel solennel à l’État pour qu’il change ses politiques d’aide au développement de ces territoires qui sont frappés par la pauvreté.

Dans une lettre ouverte publiée à l’occasion de l’ouverture de la conférence des RUP européennes , les élus ont dénoncé « une situation de mal-développement structurel » et les inégalités « de plus en plus criantes », dont souffrent les populations de ces territoires d’Outre-mer.

Dans leur document, les présidents des RUP souhaitent élaborer un nouveau cadre d’application des politiques publiques pour qu’elles soient plus proches des « réalités propres de chaque région » et placer les leviers de décision « au plus près des territoires ». Ils insistent également sur la nécessité d’une « nouvelle politique économique » fondée sur leurs « atouts notamment géostratégiques et écologiques ».

Pour le président de la Région Guadeloupe, Ary Chalus, « il n’est pas question que la loi sur le littoral soit votée, par exemple, à l’Assemblée nationale et que cela s’applique à nous directement ».

Ce texte est destiné à déclencher une prise de conscience. Le président de la Collectivité Territoriale de la Martinique (CTM), Serge Letchimy, et ses collègues expliquent leur démarche dans un texte relativement concis. « Face aux situations de mal-développement structurel à l’origine d’inégalités de plus en plus criantes qui minent le pacte social », il devient urgent « d’ouvrir une nouvelle étape historique pour nos territoires d’outre-mer ».

Cet appel solennel à l’Etat intervient dans un contexte de fin de « l’Etat providence ».

Les exécutifs en appellent à une large concertation avec les populations et les forces vives des territoires.

Les présidents des RUP françaises ont convenu de montrer leur unité et d’expliciter leur vision au président Emmanuel Macron.

A cette rencontre, ils espèrent évoquer « l’ensemble des questions économiques, sociales et institutionnelles qui se posent à chacun de nos territoires, pour le présent et pour l’avenir ».

20 ans auparavant…

L’appel de Fort-de-France lancé en mai 2022, fait écho à un autre texte plus ancien, celui de la déclaration de Basse-Terre. Il y a plus de 20 ans, les trois présidents de région de Guadeloupe, Guyane et Martinique signaient un document de deux pages, sobrement intitulé « Déclaration de Basse-Terre ».

Les présidents notent (déjà), entre autres, « un affaiblissement des filières productives, la déstabilisation financière des collectivités, un assistanat généralisé, un taux de chômage croissant ». Ils pointent du doigt également « le développement rapide des dérives sociales, destructrices (…) en particulier pour les jeunes générations dont les perspectives d’emploi apparaissent de plus en plus aléatoires ».

Certes, ce document présenté au président Jacques Chirac n’a pas débouché sur l’instauration d’un nouveau statut social et fiscal en Guyane, en Guadeloupe et en Martinique. Néanmoins, les présidents des régions de l’époque – Antoine Karam de Guyane, Lucette Michaux-Chevry de Guadeloupe et Alfred Marie-Jeanne de Martinique  – ont obtenu le déblocage du verrou juridique empêchant toute modification de nos institutions.

Plus de 20 ans plus tard, il reste à savoir si le président Emmanuel Macron récemment réélu sera en mesure d’entendre cette interpellation des élus.

La politique menée dans les territoires d’outre-mer durant le premier quinquennat ne semble pas avoir convaincu.

Aujourd’hui, les questions liées à la modernisation des rapports entre l’Etat et les collectivités et à l’appartenance à la République se posent à nouveau. Le moment est arrivé de rompre avec les archaïsmes d’un système économique mortifère et d’élaborer un nouveau paradigme.

Les exécutifs comptent « instaurer un dialogue exigeant et rénové avec l’Etat ».

- Définir un nouveau cadre pour modifier les relations avec l’Etat dans le but d’arrêter des politiques publiques tenant compte de nos réalités.

- Domicilier les leviers de décision pour parvenir à l’égalité des droits.

- Imaginer un nouveau modèle de développement à partir des potentialités de nos territoires.

Votre commentaire